L’éditeur nous dit : «Le récit s’évertue surtout à développer l’intrigue amoureuse, ambiguë et immorale qui attacha un frère à sa sœur chérie, dénoncée par les autorités spirituelles et souveraines, insérée dans les événements dramatiques liés aux aléas politiques de cette fin de Moyen Âge» (1). Écrivain et historien, l’auteur n’en est pas à son coup d’essai. Dans ce nouvel ouvrage, il réussit le tour de force de retrouver la trace d’un «manuscrit parcheminé, rendu en partie inexploitable par le dégât des ans et la difficulté de lecture, de Guilhem de Marsan – 1397-1498 – chambellan des comtes d’Armagnac». Sous une forme romancée, l’auteur s’efface derrière le chambellan qui laissera tomber sa plume… à 100 ans ! Le frère en question est Jean V, comte d’Armagnac, dès 1450, et vicomte de Lomagne, qui n’en fait qu’à sa tête malgré les sages conseils de son chambellan. Petit, râblé, la tête enfoncée dans le cou, il est respecté et redouté sur son immense territoire gascon qui s’étend des Quatre Vallées à l’Auvergne et au Gévaudan. Il a rencontré Jeanne d’Arc et fait allégeance à Charles VII, son roi. La fin de la guerre de Cent ans approche. Dès qu’il le peut, il revient dans son château de Lectoure où l’attend sa jeune sœur Isabelle d’Armagnac qui n’a d’yeux que pour lui, ne rêve que de lui…qui en est amusé. Peu à peu, la jolie adolescente devient femme en ses 17 ans. Lui, petit et plutôt disgracieux, la regarde avec curiosité puis une passion dévorante naît entre frère et sœur. Le récit s’érotise, les acouplements «à la hussarde» s’enchaînent tout le jour. Cette chaleur intense, sans fin, s’accouchera, dans de grandes douleurs, de trois enfants. Au château, personne ne veut voir les grossesses d’Isabelle. Sa passion est telle qu’elle endure, sans mot dire, les assauts brutaux de l’amant pressé et s’abandonne, la nuit venue, aux raffinements saphiques de Raymonde, sa suivante. Dans une belle langue, l’auteur nous entraîne dans la dure réalité d’une époque tourmentée et son travail de recherche historique est digne de tous les éloges.
(1) « Jean et Isabelle d’Armagnac ou la constance incestueuse» – Serge Pacaud – Éditions Gascogne – 400 pages – avril 2016 – 25 €.