Le caractère le plus remarquable de l’œuvre de Gribeauval n’est pas l’excellente adaptation de ses matériels à leur emploi mais la manière dont ils ont été définis par leur créateur. En vue d’en permettre la fabrication répétitive dans les meilleures conditions, le dessin des bouches à feu est radicalement simplifié et leur ornementation supprimée. On jugera du changement en comparant Le Castor et Le Sourd avec Le Sarasin (Douai 1789) qui a les mêmes dimensions qu’eux. Ainsi, le nouveau matériel est véritablement normalisé et l’interchangeabilité est assurée jusqu’au niveau des sous-ensembles et des pièces simples. Les dimensions que fixent les tables sont assorties de tolérances de réalisation, les instruments de mesure ainsi que les gabarits de fabrication et de contrôle sont définis avec précision, exemple du premier, Le Castor et Le Sourd, exemples du second. Le 30 mai 1793, la Convention Nationale décrète qu’une fonderie de canons sera établie à Tarbes. Cette décision intervient après le souhait exprimé par le Conseil général du département d’implanter une fonderie de canons «dans le double objet d’enlever à la superstition ses armes et d’en procurer de nouvelles à la Patrie». Un arrêté a été pris quelques jours plus tôt pour mettre en réquisition la plupart des cloches du département. L’établissement choisi est le couvent des Frères Cordeliers qui est devenu Maison nationale, depuis le 20 décembre 1792, après avoir servi de siège aux États de la Province de Bigorre et abrité les dernières séances des assemblées du Clergé et de la Noblesse, au mois d’avril 1789. Secrétan, un luthier-tabletier accepte de diriger la fonderie pourvue de bronze et exécute quelques perforations de canons. La vie éphémère de l’atelier s’achève, le 1er juin 1796, car, ce jour-là, le département l’adjuge pour 6400 F à François Dassieu, officier de santé à Tarbes. La République ayant la permission du propriétaire, on y fabriquera des baïonnettes, piques, affûts de canons et réparations des trains et équipages d’artillerie, équipements dont l’Armée des Pyrénées est cruellement dépourvue. Le 10 février 1798, il ne reste plus que «la mécanique et l’attirail de l’ancienne fonderie».