Celle qui élevait des taureaux de combat

À tous les anticorrida, je leur demande de ne pas lire cette chronique qui leur ferait mal. À tous les autres qui ont l’afición de la corrida et du vrai taureau de combat, mon héroïne est une femme de caractère qui n’en pouvait plus de la déliquescence de taureaux génétiquement affaiblis, aux armures trafiquées pour le bon plaisir des « vedettes » aux cachets mirobolants (1). Dolorès est amoureuse, depuis l’âge de 6 ans, des taureaux de Bilbao qui combattaient avec bravoure aux arènes de Vista Alegre. Vers 1945, elle est mariée à l’industriel Federico Lipperhide. Leur ami Antonio Ordoñez leur indique « Dehesa de Frias » une propriété mise en vente couverte de chênes-lièges et chênes verts, dans la Sierra Norte de Séville. Il leur propose de l’acheter pour en faire un élevage de taureaux. C’est une folie pour elle mais Federico l’encourage, tenace. Elle cédera et une aventure extraordinaire d’éleveuse de taureaux mondialement connue commencera pour elle. Dans un milieu d’hommes, elle soutiendra cette gageure. De l’achat de quelques vaches et d’un reproducteur mâle « Carabella » au conde de La Corte, puis avec les conseils d’Atanasio Fernández, homme de campo avisé, elle se lance. Les infrastructures sont construites. Elle débute officiellement le 25 mars 1978 dans les arènes de La Malagueta avec pour affiche Curro Romero, Francisco Rivera « Paquirri » et José Maria Manzanares. Le combat des « Doloresaguirre » lui a déplu : manque notable de force, problème capital du troupeau. De là, elle contrôlera tout : semence, nouveau mayoral qui refuse l’afeitada (épointage des cornes), une intransigeance absolue. Les combats des fauves de Dolorès seront admirés à Madrid, Bilbao, Pampelune. Elle aimait la France où le taureau primait sur le torero. Elle déclarait : « J’aime le taureau intègre qu’il faut combattre, celui qui a de la caste, de la race, de la puissance, qui produit de l’émotion». Elle souffrait de voir ses pensionnaires châtiés par 6 piques afin d’amoindrir leur fougue. Un livre bien traduit, documenté, illustré, pour les aficionados.

(1) « Dolorès Aguirre – Celle qui élevait des toros » – Eneko Andueza Lorenzo – Éditions Atlantica – juillet 2015 – 22 €.

Laisser un commentaire