65 – Us et coutumes dans les H.P

Les Rogations – Le curé Duclos de Saint-Lézer est un poète et raconte : « Cette cérémonie champêtre des Rogations est une procession à travers les champs rougeoyants des trèfles et les larges carrés de lin au bleu délicatement azuré. Elle contourne les pièces de blé et d’avoine au vert changeant, disparaît dans les chemins creux bordés d’ajoncs et d’aubépines, surchargés de fleurs jaunes et blanches, s’égrenant au souffle de la brise matinale ou sous le poids des gouttes de rosée. Elle reparaît bientôt dans les prés émaillés de jaunes renoncules, ou au milieu de seigles ondoyants, sur lesquels les capulets blancs ou rouges des femmes font des taches mouvantes. Les bannières multicolores resplendissent dans un fin nuage de poussière, coloré par le clair soleil de mai qui, dissipant dans le lointain la brume en vapeur lumineuse, met à découvert un horizon de montagnes bleues, aux teintes douces et fondues. Les voix enfantines s’élèvent en notes claires. Les oiseaux, muets dans les aulnaies touffues encadrées de peupliers élancés, interrompent un instant leurs chansons printanières, qu’accompagne le bruissement du ruisseau coulant sur les cailloux, à travers les joncs; au loin s’éteignent, assourdis, les derniers tintements des cloches. Au détour d’un sentier, un laboureur, le béret à la main, devant ses bœufs au regard étonné, ruminant le souffle humide, se signe gauchement et sourit aux figures de connaissance dont la prière ingénue doit préserver la récolte. De cette nature s’exhale un charme étrange, un parfum pénétrant qui semble amollir les fidèles. Le suisse perd de sa raideur, les porteurs de croix s’espacent. La procession s’allonge, le prêtre lui-même, sous son étole à épis de blé et grappes de raisin brodés d’or, sent, fils de paysan, son cœur ému dans cette campagne couverte de riches moissons pleines de promesses. À la vue de son village natal, perché en face sur la colline baignée de lumière, la prière s’échappe plus fervente de ses lèvres… ». La fraîcheur de ces lignes, écrites en 1786, fait du bien à l’esprit après la fureur cathodique des journées d’entre les deux tours du vote municipal. À suivre…

 

Laisser un commentaire