15 – Aux Pyrénées : De Luz à Barèges

Le comte de Vaudreuil regardait les montagnards de Bigorre comme des prédateurs des proies amenées par les vents de la plaine. Les habitants de certaines côtes regardaient les étrangers comme des malheureux naufragés que la mer jetait sur leur plage. Léon Richard  déplore ce jugement trop sévère et constate que l’étranger n’est pas une proie mais plutôt un domaine que les montagnards exploitent ; cette exploitation étant la ressource, l’industrie, la fortune du pays. Revenons à la prétendue tristesse de Barèges éloignée de Luz par deux heures de route et une lieue de poste (4,384 km) de distance. Les villages traversés : Esterre, Viella, une route bordée de peupliers et bien entretenue, Betpouey, entrée de la vallée de Barèges. La comtesse de l’Épine peint Barèges au pinceau noir : «Tout est tristesse, malheur, dans le passé, dans l’avenir ; on compte à peine sur le présent, et les habitations que l’on élève au printemps se défont en automne pour les dérober aux dangers de l’hiver. Toutes les crêtes des montagnes sont pelées, quelques arbres se voient à peine au-dessus des bains ; point de promenade, si ce n’est la route qui descend à Luz. Il faut être malade pour venir à Barèges et compter sur l’agrément d’une bonne société qui peut seule consoler de l’obligation de vivre dans ce lieu sauvage». Cette femme qui passait pour la plus spirituelle de son époque, n’avait pas compris que seules quelques baraques en bois subissaient ce transfert printemps-hiver. L’entourage de la comtesse en rit encore. Léon Richard déplore que Barèges n’offre, sur un sentier incliné, qu’une rue étroite, composée d’environ 80 maisons, dont une trentaine est assez belle. La célébrité de ses eaux ne date que de l’époque où madame de Maintenon y amenait le duc du Maine. C’est à l’ingénieur Polard que l’on doit la distribution et les réservoirs qui les reçoivent. Le père de celle qu’il aimait voulait un gendre qui se fixerait dans les montagnes. Polard «rejeta cette tyrannique condition, et son génie, qui l’appelait ailleurs, triompha de son amour». Léon Richard va gémir de ce gave insupportable, hurler jour et nuit, et décrire les bienfaits de l’eau sulfureuse de Barèges. À suivre…

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